JoY's YAOI stories : EnJoY !


Il m’entraîne au bout de la nuit

Je suis détective et à cause des habitudes de mon travail, je ne peux m’empêcher d’observer les gens, sans arrêt. Mon voisin, qui habite dans l’immeuble opposé au mien, de l’autre côté de la rue, en a fait les frais. Je ne savais pas s’il remarquait mes regards insistants sur sa fenêtre, mais c’est quand il a emménagé en face de chez moi il y a cinq mois, un matin de janvier, en plein hiver, que tout a commencé. Dès lors, je n’ai pu m’empêcher d’observer ses moindres faits et gestes. Aujourd’hui, tout est différent, beaucoup de choses ont changé, mais pendant nos cinq mois de voisinage, quand nous étions l’un pour l’autre de parfaits inconnus, voici ce qui s’est passé.
Il ne sortait que le soir, vers vingt heures, un sac sur le dos. Je me demandais pourquoi il sortait aussi tard, je me faisais des idées, on entendait toutes sortes de rumeurs à son sujet dans le quartier. Il levait toujours la tête vers ma fenêtre quand il partait, et j’y étais toujours. Je l’attendais. Chaque jour, c’était notre seul contact. Pas de sourire, pas de paroles échangées. Seulement un regard, vide de sens, mais qui suffisait amplement à mon bonheur.
Il rentrait vers quatre heures, au beau milieu de la nuit. Je mettais toujours mon réveil à sonner à quatre heures moins cinq pour ne jamais le rater. Il ne manquait pas de jeter un regard vers moi. Parfois, il restait dehors pendant quelques minutes, la jambe gauche repliée, le pied posé sur le mur. Il fumait sa cigarette quotidienne, du moins celle de cette heure là. Il faisait froid à cette période de l’année. C’est pourquoi il était emmitouflé dans son blouson blanc, la capuche rabattue sur la tête et les mains se joignant dans la poche centrale. Une écharpe noire, enroulée autour de son cou, était en parfait contraste avec son haut et dissimulait un peu son visage. Il portait un bas de survêtement noir et des baskets dernier cri. Il avait l’apparence d’un adolescent de quinze ans qui suivait la mode, fumait et sortait pour faire la fête toute la nuit, mais l’image qu’il renvoyait quand je l’apercevais devant sa fenêtre était totalement différente. Il était généralement assis sur son canapé, un livre à la main, des lunettes sur le nez. Il ne s’en rendait sûrement pas compte mais elles lui donnaient un petit côté sexy que probablement seulement moi remarquais. Il vivait seul, et sa décoration, du moins le peu que j’en voyais, était très discrète. Son salon, qui était la seule pièce que je pouvais apercevoir, était toujours parfaitement rangé. Rien ne traînait. On était bien loin des clichés habituels à propos des jeunes. Je me demandais souvent quel âge il avait, ce qu’il faisait de sa vie.
                              ***
Au début, ce n’était que de la curiosité, mais au fil du temps, je ne pouvais plus me passer de son regard. Quand je le ratais (ce qui m’arrivait très rarement, mais parfois il y a des imprévus), je ne dormais pas de la nuit. Je la passais debout, devant ma fenêtre, à attendre son retour. Il n’était jamais en retard, il rentrait toujours à la même heure, à quelques minutes près. Ce qui ne faisait que m’intriguer un peu plus chaque jour car s’il passait sa nuit en discothèque avec des amis comme je l’imaginais, il ne rentrerait pas toujours à la même heure. Des soirées peuvent parfois être intéressantes, parfois ennuyeuses. On peut rentrer tôt ou tard.
Je me posais de plus en plus de questions. Mon travail m’avait appris à me méfier. Sa discrétion ne faisait qu’ajouter de la méfiance à son égard. Les criminels sont la plupart du temps très discrets dans leur vie et peu bavards pour ne pas se faire remarquer et éviter qu’on leur pose trop de question auxquelles ils ne pourraient pas répondre, sans mentir.

Je crois que sans le vouloir, je tombais peu à peu amoureux de lui. Je n’osais pas me l’avouer. Comment aurais je pu tomber amoureux d’un homme dont je ne connaissais que la façade de son appartement et le contenu de son salon ?
Après quatre mois passés à nous regarder quotidiennement, je décidai d’aller l’attendre dehors, à l’heure de son retour. Je prétextai un lacet défait et me penchai comme pour le rattacher, attendant son arrivée. Il faisait froid, je tremblais, mais je résistais. J’avais pris une décision et je devais m’y tenir. Je n’en pouvais plus de ne jamais pouvoir lui adresser ne serait-ce qu’un mot. Il arriva, d’un pas mais avec une allure très masculine et assurée, malgré sa tête baissée. Il ne me vit certainement pas, car il trébucha sur moi. Il tomba lourdement sur le sol et je m’en voulus aussitôt. Il était complètement inconscient, je ne savais pas quoi faire. Je fis la première chose qui me vint à l’esprit : je le pris dans mes bras et l’amenai à l’hôpital qui n’était qu’à cinq minutes à pied de chez moi. Je remarquai à peine les regards choqués et apeurés du personnel de l’hôpital qui fixait l’homme que je portais d’une étrange façon. Ce n’est qu’une fois que j’aie expliqué ce qui s’était passé, qu’on lui ait prodigué les soins dont il avait besoin, assez importants, et qu’on l’ait installé dans un lit, toujours inconscient, qu’un docteur entra dans la chambre et dit, sans même m’apercevoir :

- Mais c’est… il faut prévenir.

Il avait l’air à la fois surpris et effrayé. Je n’eus pas le temps de lui demander pourquoi il réagissait ainsi qu’il était déjà sorti de la pièce, plus vite qu’il n’y était rentré et se parlant inaudiblement à lui-même. J’observai mon voisin, allongé devant moi. D’énormes cernes soulignaient ces yeux. Qui était-il ? Pourquoi avait-il l’air si fatigué ? Que faisait-il de ses nuits ? Pourquoi ces gens réagissaient tous ainsi en le voyant ? Autant de questions sans réponses qui me torturaient l’esprit.

                              ***
Après que le docteur m’ait promis de me tenir au courant d’une quelconque évolution de son état, je décidai de rentrer chez moi, car après tout, cet homme n’était que mon voisin. Nous ne nous connaissions pas vraiment. Il était vingt-trois heures et je commençais à être fatigué. Etrangement, je dormis bien cette nuit là. Je n’avais pas peur de le rater, sachant qu’il passait sa nuit à l’hôpital. Je me levai le lendemain matin, vaquai à mes occupations habituelles et partis à mon bureau vers neuf heures. La journée passa lentement. Le docteur ne m’appelait toujours pas, je commençais à m’inquiéter. Je rentrais chez moi le cœur lourd et l’esprit inquiet. Je me dirigeai directement vers mon téléphone, j’avais un nouveau message. Je l’écoutai :

« Bonsoir Monsieur. Je vous appelle pour vous dire qu’Arnaud, le jeune homme que vous nous avez amené hier soir, s’est réveillé peu de temps après votre départ. Nous l’avons gardé toute la nuit et toute la matinée pour l’examiner et être sûrs qu’il n’y avait plus aucun problème. Il est sorti ce midi et est directement rentré chez lui. Je ne vous ai pas appelé directement car je ne voulais pas vous déranger au milieu de la nuit. Vous étiez sûrement déjà couché. Au revoir et merci. »
Arnaud… Il s’appelait Arnaud. Je me rendis soudain compte qu’avant d’écouter ce message, je ne connaissais même pas son prénom. Ca lui allait plutôt bien. C’était original tout en étant simple. Pourquoi le médecin me remerciait-il ? Je n’avais rien fait pour lui. Pour Arnaud oui, mais pas pour lui. Il aurait dû m’appeler après son départ, sans se demander si je dormais ou pas. Je comprenais pourquoi il avait agi ainsi mais je ne pus m’empêcher de lui en vouloir. A cause de lui, je m’étais inquiété toute la journée et je n’avais pas pu revoir Arnaud plus tôt. Je décidai donc d’attendre que mon voisin sorte de chez lui, comme d’habitude. Etrangement, ils sortit plus tôt qu’à l’accoutumée et vint vers mon immeuble. Il entra et j’entendis ma sonnette retentir quelques secondes plus tard. J’ouvris la porte. Il me remercia simplement, d’un seul mot. Je remarquai qu’il tremblait, il semblait avoir peur de moi. Pour quelle raison ? Il me dit qu’il était pressé et s’en alla sans que je puisse ajouter quoi que ce soit. Après cet incident, il passa toujours à la même heure mais ne me regarda plus. Ca me rendit triste, je n’eus plus le courage d’aller une nouvelle fois essayer de lui parler. J’étais assez pathétique d’être découragé pour si peu mais je n’y pouvais rien.
                              ***
Il m’ignora pendant une semaine. Puis je ne le vis plus du tout pendant la semaine qui suivit. Je n’étais plus triste. Je devins insomniaque et malheureux. Je n’avais plus mon rayon de soleil quotidien. Enfin, il réapparut, le bras en écharpe. Il avait la tête plus baissée que jamais, sa démarche n’était plus celle qu’elle était. C’était celle de quelqu’un de replié sur lui même. Qu’avait-t-il bien pu lui arriver pour un changement aussi radical d’attitude ? Est-ce que ça avait un lien avec ses sorties nocturnes ?

 Je me décidai à aller chez lui. Je sonnai. Il m’ouvrit, sans me faire entrer. Il avait l’air effrayé. Je lui demandai ce qui lui était arrivé. Il cria, me répondit que je devais être bien content. Je ne comprenais vraiment pas pourquoi il réagissait ainsi. On s’énerva tous les deux car il ne m’expliqua pas pourquoi il m’en voulait.

- Tu le sais très bien, me dit-il, maintenant je comprends pourquoi tu m’observais autant !

Il me claqua la porte au nez. Je ne partis pas de suite et je l’entendis se mettre à pleurer. En descendant les escaliers, je croisai trois hommes habillés de noir de la tête au pied à l’allure brutale et effrayante. Je me dis qu’ils devaient être ses amis, ses collègues de nuit. J’eus malgré tout un peu d’inquiétude car je croyais encore que c’étaient des gens comme ça, de son milieu, qui l’avaient frappé. Mais ma colère était trop forte. Je n’attendis pas et rentrai chez moi.
Je me postai directement devant ma fenêtre. Je pouvais le voir dans son salon. Il discutait avec les trois hommes que j’avais croisés. Soudain, ils commencèrent à le bousculer, à le rouer de coups alors qu’il était au sol. J’en avais assez vu, je sortis de chez moi en courant, traversai la rue, montai les marches de son immeuble quatre à quatre, ouvrai la porte par chance déverrouillée. Je n’hésitai pas une seule seconde et me jetai sur ses agresseurs. Je ne faisais pas le poids face à eux trois, c’était évident, mais ma colère et ma volonté de le sortir de là étaient tellement fortes que mes coups s’en ressentirent. Ils prirent peur devant tant de hargne et s’enfuirent sans demander leur reste.

Arnaud était resté au sol. J’allai vers lui et le soulevai un peu afin qu’il se retrouve en position assise. Il me lança un regard rempli d’incompréhension.

- Pourquoi ?

Ce fut tout ce qu’il pût prononcer avant de s’évanouir dans mes bras.
                             ***

Je l’amenai à nouveau à l’hôpital. Je remarquai les mêmes regards que la fois précédente. Le premier médecin que je trouvai le confia à quelqu’un d’autre afin que je lui explique ce qui s’était passé. Il me fit entrer dans son bureau afin d’être plus au calme Il me dit que si ça continuait ainsi, Arnaud ne s’en remettrait pas. Je lui demandai pourquoi car je ne comprenais pas. Il m’expliqua qu’il venait à peine de sortir d’une semaine d’examens après s’être fait battre dans la rue. Je lui demandai pourquoi il s’était fait battre, s’il avait des problèmes dus à son métier. Cette fois-ci, c’est lui qui ne comprit pas. Il déclara alors :

- Je ne vois pas pourquoi il se ferait battre à cause de son métier, et il ne devrait pas subir ça simplement parce qu’il aime les hommes. On crie sur les toits que notre société a évolué. Il n’y a que quand on n’est pas comme tout le monde qu’on se rend compte que ce n’est pas le cas. Les gens se leurrent, ils ne veulent pas voir qu’aujourd’hui encore, la discrimination se trouve à chaque coin de rue. Elle est discrète mais bien présente.

J’étais très étonné, je m’attendais à tout sauf à ça. Malgré l’horreur de ce qui était arrivé à Arnaud et la vérité affligeante des propos du médecin, je ne pus m’empêcher d’esquisser un sourire. S’il aimait les hommes, alors il m’aimerait peut-être. Je ne relevai même pas le détail sur sa profession. Mais je me raidis aussitôt en repensant à notre dernière conversation. Je ne voulais pas qu’il meure en pensant que je le détestais. Je repensai aussi à ce qu’il m’avait dit et ses paroles prirent petit à petit tout leur sens. Il croyait que j’étais homophobe, que c’était moi qui l’avais frappé à plusieurs reprises et que c’était pour ça que je n’avais cessé de repérer ses heures de départ et de retour. Un frisson me parcourut l’échine. Quelle horreur !

Il resta dans le coma pendant plus d’un mois. Je passai toutes mes nuits à son chevet, je lui parlai, je lui racontai ma vie, j’improvisai notre première rencontre officielle en jouant nos deux rôles :

- Bonjour, je m’appelle Cédric, et toi ? 

- Moi, c’est Arnaud, je suis…

Mes interrogations sur sa profession revinrent alors mais je décidai de les oublier pour l’instant car il ne pouvait malheureusement pas y répondre vu son état.

Il se réveilla quelques heures plus tard alors que je somnolais, la tête écrasée sur son lit. Je sentis une pression sur ma main entrelacée dans la sienne. Je le vis entrouvrir les yeux. Il avait l’air surpris mais cette fois, il ne paraissait pas effrayé. Il avait sûrement compris que je n’avais rien à voir avec ce qui lui était arrivé. On se regarda de longues minutes dans les yeux, sans bouger, sans ciller, comme si c’était tout ce que nous attendions depuis toujours, comme si ce simple regard nous suffisait pour nous comprendre. Puis il me sourit et me demanda :

- Qu’est-ce que tu fais là ? 

- Je t’attendais, lui dis-je simplement. 
                              ***

Son sourire s’élargit. Ma réponse était brève mais lui convenait parfaitement. Il n’en attendait ni plus, ni moins. Je voulais quand même ajouter quelque chose :

- Je suis sincèrement désolé pour ce qui t’est arrivé. J’ai toujours eu de la chance, je ne me suis jamais fait frappé à cause de mon orientation sexuelle, mais je sais ce que c’est que d’avoir la peur au ventre en marchant dans la rue. Il y a toujours des personnes qui nous jugent, qui nous jettent des regards pleins de haine et de dégoût. Mais tu n’es plus seul désormais. Je vais prendre soin de toi.

Il avait les larmes aux yeux. Apparemment, ce que je venais de dire lui faisait extrêmement plaisir. Je n’avais pas terminé mon discours et j’hésitais à lui dire tout ce que j’avais sur le cœur mais la façon dont il me regardait finit de me convaincre. Après tout, je n’avais rien à perdre. Je lui déclarai alors, en soutenant expressément son regard afin d’y voir une quelconque réaction lorsque les trois mots sortiraient de ma bouche :

- Je t’aime Arnaud.

Mes paroles eurent comme effet de le faire fondre en larmes. Il était tellement ému qu’il ne pût réagir de suite. Par de simples gestes, il me fit comprendre qu’il voulait que je m’approche de lui et que je le prenne dans mes bras. Je ne me fis pas prier et le serrai aussi fort que je pouvais, sans pour autant l’étrangler, afin de lui apporter tout le réconfort et l’amour dont il avait besoin. Je sentis sa bouche s’approcher de mon oreille grâce à son souffle chaud et irrégulier. Il murmura :

- Je t’aime aussi. Depuis que nos regards se sont croisés pour la première fois, je t’aime Cédric. Le médecin m’a dit que c’était toi qui m’avais amené ici alors je lui ai demandé comment tu t’appelais, ajouta-t-il, semblant avoir deviné que je me demandais comment il connaissait mon prénom.

Il s’éloigna de moi, sans me lâcher, me regarda, colla son front au mien et ferma les yeux. Sentant que je ne montrais aucune résistance, il m’embrassa, timidement. Ce baiser ne dura quelques secondes mais il nous sembla durer une éternité. Nous en avions eu envie pendant si longtemps, nous l’avions tellement attendu. Il y mit fin à contrecoeur. Je ne dis rien, il devait se reposer. Nous étions tous les deux apaisés maintenant. Tout était dit, le pire était passé, le meilleur était à venir. Mais je devais lui demander une dernière chose :

- Juste une dernière question avant de te laisser t’endormir : dans quoi travailles-tu exactement pour avoir de tels horaires et pour que tout le monde te regarde bizarrement ici ? 

- Je suis infirmier de nuit dans cet hôpital. 

 

 

***

Non, ce n'est pas une suite, car je n'ai eu ni le temps, ni la motivation d'en écrire une.
Pour vous faire patienter, je vous présente ce petit OS. Il est simple et sans réel scénario. C'est LE premier texte que j'ai écrit contenant une relation homosexuelle^^ Il n'est pas corrigé, désolé! J'espère quand même qu'il ne sera pas trop mauvais!!!
Bisouus à tout le monde!

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Lun 11 aoû 2008 4 commentaires
j'ai bien aimée. c'est sympa, et romantique
saura - le 11/08/2008 à 20h36
Merci, c'est gentil.
Je suis contente que tu aies donné ton avis^^
JoY
Oh mais c'est tout mignon!!! ^ ^
Bloodyrock - le 11/08/2008 à 22h11
Lol oui si on veut XD
JoY
j'aime pas mal cet OS, j'aimerai bien pouvoir tomber amoureuse aussi dès le premier regard, je trouve ce genre de choses magnifique
saya - le 20/09/2008 à 15h03
C'est sur, on aimerait tous que ça nous arrive^^
Merci beaucoup
JoY
J'adoore ...C'est tout mimi... XD
miko - le 10/10/2009 à 12h54